Oser créer
C’est, d’abord, s’éveiller, s’ouvrir les yeux de l’âme, ceux du cœur et du corps, pour mieux s’émerveiller du trésor de l’aurore, d’un envol, d’une flamme, de la vie dans tes doigts, de l’ami toujours là…
Et puis, il suffit d’une dame, d’un amour, d’une idée, d’une question, d’un drame, d’une vague ou du vent, ou des sables mouvants, pour oser se lancer : convenir d’une trame, ou bien vagabonder…
Au fil de ses pensées cueillir le mot de passe, sans cesse, le presser, lui chiner des comparses, des copains, des fidèles, des compères voisins… Si l’amorce a des ailes, Il en livrera plein.
Alors, choisir les sons, choyer les sons qui s’aiment, jongler sans se lasser avec tous les phonèmes : façonner chaque vers à le faire vibrer… Qu’il ait goût de mystère, costumé de clarté…
Et que l’ensemble enchante, à frémir sans façon… Qu’il devienne ballade, élégie ou chanson, romance ou sérénade, complainte des saisons. Désormais, qu’il s’évade, Il n’est plus prisonnier…
Il en va de l’écrit comme des autres arts : tout dépend de l’esprit, tout s’attache au regard, au degré d’émotion, d’envie puis de passion...
… avant de dépasser la frayeur de mal faire, pour puiser en soi-même les richesses cachées, les bribes de poème, tous ces traits de lumière que l’on fait exister.
Ainsi, un essai d’aquarelle, quelques points de dentelle, des brindilles de lierre, un lointain paysage en timide collage, un dégrossi de pierre, des taches de lumière, une ébauche au crayon…
… deviennent essentiels, comme une possession, quand, doucement, on passe de l’esquisse à l’audace : on se laisse entraîner, étonné, envoûté par le plaisir, la grâce, par la jubilation d’avoir, enfin, osé…
Jean Briffaud 3 janvier 2011 (Poème paru dans La Flamme n° 107)
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